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LA PORNOGRAPHIE SUR LE WEB... 
Des vestiges de Pompéi à l'industrie du sexe
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Par Alain Rioux, Ph. D., Psychologie, Gestionnaire de Psycho-Ressources
Québec, Canada
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RÉACTIONS À CET ARTICLE

Des vestiges de Pompéi...

Notre conception de la pornographie est en grande partie formée par les mœurs culturelles de la société dans laquelle nous évoluons. Déjà, dans la préhistoire on retrouve des dessins érotiques sur les murs des cavernes. Plusieurs statuettes d’argile ou en pierre d’ivoire datant de ces époques lointaines représentent diverses déesses de la fertilité et de la fécondité. Ces représentations dénudées sont manifestement des expressions de la sexualité de ces cultures anciennes. S’agit-il de pornographie ? Sûrement pas ! direz-vous… En êtes-vous si certain ?

Depuis des siècles, diverses cultures ont jeté un regard favorable ou répressif sur l’expression de la sexualité et ses représentations dans des thèmes ou des scènes érotiques. Le Kama Sutra, qui date de 400 ans avant Jésus-Christ était, un manuel de pratiques sexuelles tout ce qu’il a de plus banal pour les indiens de l’époque. Or, aujourd’hui, ces textes et ces représentations sont quelquefois qualifiés de pornographiques. Les Romains avaient la coutume d’exposer des œuvres d’art érotique ou à caractère sexuel dans les lieux publics de la ville. Certaines découvertes dans les vestiges de Pompéi, au XIXe siècle, ont choqué les archéologues de l’époque qui parlèrent de pornographie pour décrire ces objets artistiques. Lors de la Révolution française, les écrits du Marquis de Sade provoquèrent son emprisonnement. En Angleterre, au XVIIIe siècle, la sexualité était vue comme sale et malsaine. La masturbation était considérée comme dangereuse pour la santé et la pornographie fut criminalisée pour la première fois.

À notre époque, à l’aube du XXIe siècle, la pornographie est souvent associée aux produits conçus pour induire l'excitation sexuelle. N’importe qui peut acheter un magazine sexuel pour sa consommation privée. Le magnétoscope a changé le visage de la pornographie et la naissance d’Internet est en train de provoquer une véritable révolution de ce phénomène. Plus la peine d’aller acheter un journal, un magazine ou de s’exposer avec honte au regard d’autrui pour payer une vidéo porno. De nos jours, quelques clics suffisent. 

Les thèmes de la pornographie

La pornographie est un sujet délicat qui éveille souvent les débats les plus engagés. Les controverses qu’elle suscite sont morales, religieuses, politiques et scientifiques. Elle présente des enjeux importants aux niveaux économique et social et sa définition demeure toujours complexe. Certains distinguent la pornographie douce (soft) de la pornographie dure (hard). D’autres vont faire une distinction entre l’érotisme et la pornographie. En parcourant les ouvrages qui traitent du phénomène de la pornographie, une seule certitude semble se révéler : il demeure extrêmement difficile de tracer une ligne entre érotisme et pornographie. 

Plusieurs groupes militent contre la pornographie en argumentant qu’elle transmet une image dégradante de la femme et des rapports sexuels. D’autres militent pour la liberté d’expression et certaines femmes revendiquent le droit d’exposer leur corps avec fierté. Quoi qu’il en soit, ces polémiques entretiennent une conception dévalorisée de la sexualité. Même si le sujet est moins tabou qu’il y 50 ans, les différentes perceptions de l’érotisme et de la pornographie sont souvent diamétralement opposées.

Malgré qu’il soit difficile de tracer la ligne entre l’érotisme et la pornographie, les chercheurs remarquent certaines constantes lorsqu’ils analysent le contenu du matériel pornographique. En ce qui concerne l’image du corps masculin, la pornographie présente l’homme comme un être puissant, possessif, libre et parfois agressif. La pornographie pousse le machisme à l’extrême, jusqu’aux limites du ridicule. Le corps masculin devient un instrument de violence et de domination dont l’attribut essentiel est un pénis d’une grosseur démesurée. De son côté, le corps féminin répond à des critères esthétiques particuliers qui sont souvent définis par les modes en vogue (seins « siliconés », épilation et maquillages extravagants). La femme est réduite à son corps, ses parties génitales, ses seins. Dans la pornographie typique, la femme est un objet de plaisir et de séduction au service de l’homme. Elle est douce, lascive, en attente.

Ces caractéristiques typées de la pornographie et cette stéréotypie des rôles sexuels font dire aux féministes que la pornographie est un moyen pour les hommes de préserver leur domination. C’est une possibilité ! Toutefois, il demeure intéressant de remarquer que certaines femmes participent activement à la production et à la vente de matériel pornographique. On pourrait alors postuler l’argument inverse et raconter que les femmes utilisent les fantasmes sexuels des hommes pour les exploiter financièrement et les maintenir dans la dépendance et la compulsion sexuelle. Tout cela laisse plutôt deviner que la vraie justification de l’industrie de la pornographie est plutôt économique que sexiste. Ainsi, il semble que ce soit surtout les règles du marché qui fixent les thèmes des produits pornographiques. Par exemple, dans la pornographie lesbienne, on retrouve des femmes qui jouent ensemble des rôles sexuels sans domination masculine. 

Les rapports sexuels représentés dans la pornographie sont presque exclusivement axés sur la performance où l’expression d’émotions entre les acteurs est très rarement imagée. Cette représentation réductive transmet une conception erronée de la sexualité au sein du couple. Ainsi, même si les jeux sexuels peuvent avoir une place importante dans la vie d’un couple et même si la pornographie peut alimenter ces jeux, elle mène à négliger qu’un couple ait autant une relation émotionnelle que sexuelle. De plus, il arrive fréquemment que la consommation de pornographie par l’un des partenaires cause des problèmes au sein du couple. Quelquefois, la source du problème est morale et concerne une perception différente de la pornographie. D’autres fois, la consommation de pornographie par un partenaire est le symptôme d’un malaise plus profond. Dans ce dernier cas, la seule suppression du matériel pornographique risque de ne pas solutionner le problème. 

La pornographie sur Internet : des chiffres ahurissants

La pornographie sur le Web est-elle le pire des virus informatiques à se propager sur l’Internet ? Voici quelques statistiques qui vous aideront à répondre à cette question. Selon Datamonitor, une entreprise qui recueille des statistiques sur l’utilisation d’Internet, les internautes ont versé près de 1 milliard de dollars US pour accéder à des sites de contenu adulte en 1998. Les prévisions suggèrent que l’industrie du sexe va rapporter plus de 3 milliards de dollars US en 2003. 

Datamonitor - http://www.datamonitor.com 
Entreprise de gestion de l’information (site en anglais). 

Même si le développement du commerce électronique se fait lentement, le commerce du cybersexe est en pleine explosion et les internautes n’hésitent pas à payer pour obtenir l’accès à des sites Web présentant du contenu à caractère sexuel. Le cybersexe représente 69 % des dépenses en ligne. Selon des chiffres extraits de la Gazette de Montréal (19 mars 1997), les analystes spécialisés dans le commerce Internet estiment qu’un site pour adulte peut facilement générer des revenus de 10 000 à 15 000 dollars canadiens quotidiennement. Certains des plus anciens affichent des revenus de près de 2 millions de dollars par mois. C’est ce que l’on appelle une activité lucrative ! 

L’organisme à but non lucratif Enough is Enough, qui s’est donné pour mission de rendre l’Internet plus sécuritaire pour les enfants et les familles, présente sur son site Web une multitude d’informations intéressantes et pertinentes sur le phénomène de la pornographie et de la pédophilie sur Internet. Des statistiques présentées sur ce site suggèrent qu’en 1998, il y avait plus de 100 000 sites pornographiques commerciaux sur Internet et que 200 nouveaux sites du même genre naissaient chaque jour. De plus, selon l’entreprise U.S. News & World Report, cette évaluation du nombre de sites pornographiques demeure conservatrice puisque personne n’a réussi jusqu’à présent à produire une recension complète de ces derniers sur le Web.

Enough is Enough (site en anglais) - http://www.enough.org  

Une étude menée pendant l’année 2000 aux États-Unis par la chaîne de télévision MSNBC et portant sur le cybersexe a révélé des chiffres impressionnants. Selon celle-ci, sur 57 millions d’américains ayant un accès à l’Internet, 25 millions visitent des sites pornographiques pour des périodes variant de 1 à 10 heures chaque semaine. De ce nombre, plus de 200 000 utilisateurs seraient dépendants des sites pornographiques, des chambres de dialogue en direct (chat rooms) et autres matériels sexuels en ligne. 

Qu’en dites-vous ? Le cybersexe est-il un véritable fléau ou une mine d’or pour les pornographes ? C’est bien entendu une question de point de vue ! 

Par Alain Rioux, Ph. D., Psychologie
Gestionnaire de Psycho-Ressources, Québec, Canada
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RÉACTIONS
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Bonjour,

J'ai lu votre article sur la pornographie sur Internet et je me permets de réagir :

Qu'en dites-vous ? Le cybersexe est-il un véritable fléau ou une mine d'or pour les pornographes ?

R: Les deux ! Mais on connaît bien l'interaction entre le sexe et l'argent, n'est-ce pas?

25 millions visitent des sites pornographiques pour des périodes variant de 1 à 10 heures chaque semaine. De ce nombre, plus de 200 000 utilisateurs seraient dépendants des sites pornographiques, des chambres de dialogue en direct (chat rooms) et autres matériels sexuels en ligne. 

R: Cette étude me paraît être assez loin de la réalité. D'après l'animateur du site Orroz, un psy ex-dépendant qui tient à garder l'anonymat, un dixième des hommes qui surfent fréquemment sur des sites X ou téléchargent des produits pornographiques seraient dépendants, ce qui multiplieraient le nombre par 10! Bien entendu, il existe des dépendances plus ou moins conscientes. C'est pour cela qu'il a mis au point un test :
- http://www.orroz.net/test.html 

En fait, il semblerait que l'on ait affaire à une véritable nouvelle drogue, dont les très jeunes (qui n'ont jamais connu le sexe "réel") risquent d'en pâtir. Dans mon cabinet, je traite quelques dépendants au cybersexe ou au chat érotique, et le travail de sevrage, même s'il n'est pas facile pour certains, est pour le moment la seule stratégie valable pour qu'ils retrouvent un équilibre affectif.

Recevez mes sincères salutations.
Patrick Giani
- http://www.giani.fr/ 
- Patrick Giani est membre de Psycho-Ressources 

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