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Les amours impossibles 
Accepter d'aimer et d'être aimé.

(présentation de livre)
Par Saverio Tomasella, Psychanalyste
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Éditions EYROLLES
Les mots de la psychanalyse
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"Coup de coeur" de France Musique

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L'AUTEUR
Saverio Tomasella exerce la psychanalyse à Nice

PRÉSENTATION

A l’ère d’internet, de l’essor des réseaux sociaux et des sites de « rencontres », il n’a paradoxalement jamais été aussi malaisé de vivre une relation amoureuse.

Saverio Tomasella propose de décrypter ce malaise et d’offrir des pistes de réflexions autour de la relation amoureuse, dans son nouvel ouvrage, Les amours impossibles. 

L’auteur présente six portraits de femmes et d’hommes, dont les noms sont empruntés à des grandes figures de la littérature (Juan, Othello), de la musique (Violetta, Tosca et Norma), ou encore de la mythologie grecque (Médée). 
En rappelant brièvement l’histoire de ces personnages, il fait un parallèle avec des problématiques qu’il a rencontré chez ses patients, au gré de son parcours professionnel.

Il expose ainsi, en s’aidant de cas concrets, les empêchements de ces femmes et de ces hommes à vivre une relation harmonieuse. Les raisons sont multiples : peur de soi, peur de l’autre, peur de l’engagement, crainte de réitérer les erreurs de relations passées, ou encore de reproduire des schémas parentaux, etc.
L’objectif n’étant pas de généraliser le propos mais bien davantage, au cas par cas, d’éclairer les zones d’ombre et de comprendre pourquoi la relation est empêchée. 

Bien que nécessaire, ce travail sur soi n’est pas suffisant pour autant. Il convient d’aller plus loin, d’aller à la recherche d’un équilibre plus profond, pour trouver en soi la force et les ressources nécessaires pour surmonter les obstacles à la relation amoureuse.

« Malgré les difficultés inhérentes à l’époque de la communication électronique et virtuelle, sur internet notamment, les sources des empêchements à aimer ne viennent pas de l’extérieur, de la société ou des autres, mais de soi, en son for intérieur, et des convictions figées qui nous limitent. »

Ce parcours, différent pour chacun, ouvre alors à nouveau les possibles de l’amour…


EXTRAIT (avant propos)

L’amour véritable franchit toujours un point d’impossibilité. (…) L’amour n’est pas à proprement parler une possibilité, mais plutôt le franchissement de quelque chose qui pouvait apparaître comme impossible.
A. Badiou, Eloge de l’amour.

Alors que les moyens techniques de communiquer se développent sans cesse et deviennent particulièrement performants, les habitants des pays nantis ont de plus en plus de mal à se rencontrer, à se parler, à s’écouter, à dialoguer, à partager, à entrer en relation et à créer des liens durables, profonds et vrais.

Parallèlement, en même temps que toutes les jouissances sexuelles semblent possibles, « permises », voire incitées, sans limites apparentes, la relation amoureuse est devenue le lieu des plus grandes difficultés et des plus fortes souffrances, quand elle n’est pas devenue tout bonnement impossible.

Ces paradoxes radicaux, redoutables même, laissent désarmés et songeurs.

Aussi, à côté d’appels aux secours de plus en plus nombreux dans le registre des addictions (y compris au sexe et à Internet) s’est également développée une demande d’aide de plus en plus forte de la part de personnes qui n’arrivent pas à rencontrer l’autre et parviennent encore moins à aimer ou à se laisser aimer. L’amour ne fait-il plus partie de nos repères fondamentaux ? Nous sommes nous à ce point déshumanisés ?

Si les phénomènes de dépendance résultent d’abord de la peur de l’isolement, de la peur du manque et surtout de la peur de l’abandon, l’impossibilité d’aimer – elle – découle aussi et surtout de la peur de soi, de la peur de l’autre et de la peur de l’amour, qui est aussi peur de la relation. Ces peurs pouvant prendre toutes les formes : angoisses, frayeurs, paniques, etc.

De là à considérer l’impossibilité de l’amour comme l’autre face de la médaille des dépendances, il n’y a qu’un pas. Ce constat, pour juste qu’il soit, n’englobe pas la totalité du phénomène, beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord.
L’impossibilité de rencontrer l’autre, et de l’aimer, n’est pas que le miroir inversé de la dépendance affective, il a en outre deux versants indissociables :

  • l’un, intime et intrapsychique, concerne la plus ou moins bonne conception de soi-même, autant que l’intériorisation des anciennes relations vécues et leurs destins plus ou moins heureux ;

  • l’autre, extime et intersubjectif, renvoie aux malaises de la civilisation actuelle et à ses illusions, parmi lesquelles la place de plus en plus grande du virtuel, de l’individualisme et du consumérisme.

Cependant, toute destinée étant singulière, nous ne pourrons pas généraliser et nous devrons – pour être honnêtes – aller y voir de plus près, au cas par cas, témoignage après témoignage, car chaque être et chaque histoire sont uniques…

Saverio Tomasella 


« Coup de cœur » de France Musique, « Matinale » du 14 février 2012. 

1) Qu'appelle-ton « amour impossible »?

Il existe deux grandes familles d’amours « impossibles » : d’une part les couples qui fonctionnent durablement sur le mode de la mésentente, de la défiance, voire de la maltraitance ; d’autre part, les personnes célibataires qui éprouvent de très grandes difficultés à rencontrer une personne qui leur convienne pour vivre une relation amoureuse, et de ce fait restent seules… Le livre traite de ce second point : les obstacles à la rencontre amoureuse.

2) De quelle façon la rencontre amoureuse peut-elle devenir impossible ?

Plusieurs types de freins sont envisageables :
- Des raisons pratiques : une femme qui n’arrive pas à sortir du fait d’un manque de temps : après le travail, elle doit s’occuper de ses enfants, des courses, des repas de la maison, etc. Lorsqu’elle a un peu de temps devant elle, elle donne des nouvelles à la famille, aux amis, mais elle n’est pas assez disponible pour se lancer dans une relation amoureuse.
- Un tempérament réservé : certains hommes timides ont peur de ne pas plaire ou d’être rejetés, ils préfèrent donc ne pas prendre le risque d’approcher une femme, où le font sous forme de flirts d’un soir, sans réussir à aller plus loin.
- La blessure d’une rupture douloureuse encore non cicatrisée ou le deuil encore non fait d’un amour perdu.
- L’angoisse d’être abandonné (ou la mémoire d’un abandon passé) qui empêche de s’engager vraiment.
- Des idées arrêtées sur l’âge, la taille, la couleur des cheveux ou des yeux, les revenus, le type de métier, le niveau social, l’origine ethnique ou la religion.

3) Certaines personnes y sont-elles plus exposées que d'autres ?

Oui, bien entendu. Cela dépend des circonstances, du contexte et de l’histoire de chacun.
- Après une séparation mal vécue, une personne qui a été très déstabilisée peut avoir perdu confiance en elle, en sa capacité à être aimable ou à plaire. 
- D’une tout autre façon, si l’entourage amical ou familial met la pression sur un individu qui peine à se risquer à aimer, cela ne peut qu’exacerber ses peurs de se lancer ou ses craintes d’être jugé. La difficulté de rencontrer est alors accrue.
- Suite à une trahison, il est peut sembler parfois pendant longtemps inenvisageable de recommencer à à s’impliquer dans une relation amoureuse et à s’engager, pour éviter à tout prix la douleur d’être à nouveau trompé(e).

4) Est-il possible de s'enfermer dans une relation amoureuse impossible ? Pour quelles raisons ?

Oui, cela arrive souvent pour des raisons à la fois conscientes et inconscientes.
Du côté conscient, il y a l’éducation familiale et sociale qui imprime et ancre en nous des modèles sur l’amour, sur le couple, sur la relation, sur le bonheur, etc. Pendant longtemps, nous nous croyons obligés de suivre ces modèles pour être intégrés dans nos groupes de référence (famille, amis, milieu social) et surtout parce que nous n’imaginons pas qu’il existe d’autres façons d’aimer.
Du côté inconscient, c’est encore plus compliqué. Nous héritons des histoires d’amours de nos parents, grands-parents et ancêtres, à la fois à travers ce qui nous est raconté, mais aussi de tout ce qui est tu et qui s’infiltre parfois à travers des émotions particulières, des silences soudains, des gênes, etc. Puis, bien sûr, il y a notre histoire personnelle, nos premières amours, plus ou moins heureuses ou malheureuses, qui nous ont fortement marquées, quoi que nous en disions…

5) Comment éviter de reproduire les schémas qui mènent à l'impasse amoureuse ?

Déjà, en repérant quels sont les modèles (conscients et inconscients) qui déterminent mes idées, mes croyances et mes actions. Cette mise en conscience peut prendre du temps et peut également nécessiter l’aide d’une personne extérieure (ami de grande confiance, et surtout thérapeute).
Il reste alors à choisir de modifier ces « schémas directeurs », progressivement : en acceptant de lâcher nos idées reçues et nos croyances limitantes, en osant expérimenter différemment notre façon d’entrer en relation avec les autres, par exemple en assouplissant nos critères de sélection, en arrêtant de les juger, en s’intéressant plus à eux et en les interrogeant sur ce qu’ils sont, ce qu’ils vivent, ce qu’ils ressentent, etc. Ces changements en entraînent peu à peu d’autres sur nos projets de vie, laissent plus de place à l’étonnement et à la surprise. Nous devenons plus attentifs, plus disponibles, plus empathiques, donc plus vivants et plus capables de vivre l’amour…

© Saverio Tomasella (Questions de Laurence Ostolaza, France 2, lundi 13 février 2012).

Par Saverio Tomasella, Psychanalyste
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Autres livres de l'auteur: 

- La traversée des tempêtes : Renaître après un traumatisme  

- La perversion: renverser le monde  

- Le sentiment d'abandon  

- Le surmoi: il faut, je dois...  .

- L'inconscient. Qui suis-je sur l'autre scène?  .
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